L’intimidation sous toutes ses coutures!

Carolanne Tremblay
Carolanne Tremblay

Introduction

Peu importe où nous nous trouvons en Occident, l’intimidation est LE sujet de l’heure quand on parle d’éducation et des problématiques que rencontrent les élèves en 2017 ! J’entends régulièrement des gens de ma génération parler du fait que « ça existait aussi dans notre temps, mais qu’on n’en parlait pas autant ! » D’autres disent même que « si on en parlait moins, il y en aurait moins », « que les jeunes d’aujourd’hui ne savent plus faire la différence entre taquinerie et intimidation ». Ce que ces personnes oublient, c’est que les temps changent, les méthodes aussi. Oui ! À notre époque, il y avait de l’intimidation. Quand nous étions différents, trop petits, trop grands, les oreilles décollées, un style vestimentaire hors de l’ordinaire, on se faisait « écœurer » dans la cour d’école ou au parc, on se faisait crier des noms, il y avait des batailles, etc. Cependant, une fois arrivé à la maison, tout redevenait calme.

Pourquoi parle-t-on autant d’intimidation aujourd’hui ?

C’est qu’avec l’avènement du Web, des médias sociaux, des textos, si un jeune se fait « écœurer » à l’école ou au parc, ça se poursuivra à la maison et ça se propagera rapidement dans son entourage. Quand un commentaire négatif est écrit sur ton mur Facebook, tout le monde le voit, certains peuvent le partager et d’autres en rajouter. Avec les textos, des gens peuvent te harceler sans cesse, et ce, jusque dans la nuit… La barrière de l’écran donne l’impression au jeune qu’il peut dire tout ce qui lui passe par la tête. De plus, l’écran le protège de la réaction de l’autre, il ne voit pas tout le mal qu’il lui fait subir. Ça dégénère rapidement en situation d’intimidation. C’est ce que ma génération oublie souvent !

Les jeunes d’aujourd’hui doivent affronter le monde réel en plus de braver le monde virtuel. Quotidiennement, un jeune qui subit de l’intimidation peut se faire traiter de nom 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Je ne minimise pas ce que les gens de ma génération ont vécu pendant leur enfance ou pendant leur adolescence. Cependant, lors des vacances d’été à la maison, dès l’arrivée à la maison et pendant la nuit, nous avions la sainte paix ! Ce n’est plus le cas des jeunes actuellement.

L’intimidation, c’est quoi ?

L’intimidation, c’est plus que juste de se faire « écœurer » ou de se faire « niaiser ». C’est quand une personne ou un groupe de personnes posent des gestes négatifs à répétition et de manière soutenue envers un autre individu. Ces actes sont faits dans le but de le blesser ou de lui nuire. Ça se déroule habituellement sur une plus ou moins longue période de temps.

C’est un phénomène social et il est primordial d’être attentif à l’effet des gestes sur la personne ciblée. Si ces gestes causent de la détresse, de l’insécurité, contribue à entretenir une faible estime de soi, que la personne se sente humiliée ou impuissante à agir, ça ressemble fortement à de l’intimidation. À l’inverse, pour certaines personnes, ces mêmes gestes pourraient ne pas être considérés comme de l’intimidation, car la personne ciblée ne se sent pas affectée par la situation. Le ressenti de l’individu à ce moment doit être un signal d’alerte.

Il faut être prudent quant à nos jugements d’adulte lorsqu’un jeune se dit intimidé. On croit souvent à tort qu’il exagère, que ce ne doit pas être si grave que ça, qu’il voit la situation pire que la réalité. Un enfant ou un adolescent qui se fait constamment répéter des commentaires négatifs à propos de son physique, de sa personnalité, de son allure générale ou de ses capacités, et ce, jusque chez lui sur les médias sociaux, c’est de l’intimidation. S’il le ressent ainsi, il faut le traiter ainsi. Un point c’est tout. Nous nous devons, en tant qu’adulte, d’être attentif à ce qu’il a vécu, à ses perceptions et à ses émotions. Nous nous devons aussi de l’accueillir comme il est, d’ouvrir la discussion, d’éviter de le culpabiliser, de faciliter une communication saine et ouverte qui met l’accent sur la relation. Le but est d’aider le jeune victime d’intimidation à se construire en utilisant son expérience relationnelle.

Les statistiques parlent

Ou plutôt les statistiques crient que l’intimidation est un sujet à traiter avec sérieux. C’est un peu plus de 20 % des jeunes entre 12 et 18 ans qui sont victimes d’intimidation et entre 20 et 28 % des jeunes de 6 à 12 ans. C’est donc un jeune sur 5 qui dit avoir été victime de gestes d’intimidation. Quand on pense qu’environ 64 % des jeunes vivant une situation d’intimidation ne dénoncent pas, on peut croire que le pourcentage de jeunes intimidés est plus important. Seulement deux jeunes sur cinq dénoncent ce qu’ils traversent et c’est souvent parce que ce sont des gestes physiques ou que leur intimidateur a brisé leur matériel. Dans la catégorie des jeunes intimidés, c’est 15 % qui ont vécu de l’intimidation par l’intermédiaire du Web ou des réseaux sociaux.

Si nous prenons les statistiques de l’autre côté, on constate que 30 % des élèves ont admis avoir intimidé d’autres jeunes et que plus de 70 % d’entre eux ont déjà été témoins d’une situation d’intimidation. Mais la question qu’on se pose, est de ce pourcentage de témoin, combien ont osé dénoncer ? Combien ont osé s’interposer entre l’intimidateur et sa victime ? Peut-être qu’il y aurait plus de dénonciation si ces témoins savaient que lorsque les spectateurs interviennent, l’intimidation cesse en moins de dix secondes. Si ces témoins savaient l’importance qu’ils ont et leur influence à cesser l’intimidation, cela pourrait grandement contribuer à ce qu’ils s’impliquent lors de situations d’intimidation et qu’ils aident à mettre fin à ces événements, comme le démontre la statistique. Les intimidateurs désirent souvent plaire aux témoins et l’implication de ces derniers est primordiale. Quand les témoins connaissent leur pouvoir, il est plus facile pour eux d’intervenir.

Les travailleurs scolaires dans tout ça

Que devons-nous faire en tant qu’adultes travaillant dans une école ? Premièrement, il faut savoir que plus de 70 % des intervenants scolaires avouent avoir déjà été témoins d’une situation d’intimidation. C’est un grand nombre d’adultes qui ont assisté à des situations de violence pendant leur travail. Je crois que, tout d’abord, il faut réagir quand on assiste à une situation où un jeune est intimidé. Il ne faut jamais laisser passer ce genre d’acte sans réagir, même si ce n’est pas un élève dont nous avons la charge, même si nous avons peut-être mal entendu, même si nous n’avons pas assisté à toute la scène… Il faut y mettre un terme sur-le-champ.

Nous traiterons plus en profondeur du rôle des travailleurs scolaires dans le second texte de notre dossier sur l’intimidation dans les milieux scolaires.

À suivre…

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