Violence et intimidation : Et si l’école bienveillante commençait d’abord par un soi bienveillant?

Caroline Cormier
Caroline Cormier

Comme nous le savons, la violence et l’intimidation sont des phénomènes beaucoup trop présents en milieu scolaire. Au-delà des gestes vécus et commis par les élèves, aussi malheureux cela soit-il, la violence et l’intimidation peuvent aussi survenir entre les adultes d’un même milieu scolaire.

Selon la Chaire de recherche Bien-être à l’école et prévention de la violence de l’Université Laval, entre 2013 et 2017, l’exclusion et la mise à l’écart de la part des collègues était la forme d’agression la plus courante vécue entre les adultes d’un milieu scolaire, suivi par les insultes et les jurons, puis par les propos humiliants. Les adultes de l’école seraient aussi victimes de ces mêmes comportements violents, mais cette fois-ci, de la part des parents d’élèves. D’autres situations sont aussi répertoriées, comme des gestes de violence vécus de la part d’un ou de plusieurs élèves, auprès d’un membre du milieu scolaire.

Mais quelle est la différence entre des gestes d’intimidation et des gestes de violence?

Lorsqu’il est question d’intimidation, les comportements, paroles, actes ou gestes, qu’ils soient exprimés directement ou indirectement, doivent comporter les critères suivants; être délibérés ou non, se répéter dans le temps, être réalisés dans un contexte caractérisé par l’inégalité des rapports de force, causer de la détresse, et doivent blesser, opprimer ou ostraciser celui ou celle qui en est victime.

Quant à elle, la violence est toujours exercée intentionnellement, dans le but d’engendrer de la détresse, de blesser, d’opprimer ou d’ostraciser l’autre. Il s’agit d’une manifestation de force, qu’elle soit physique, verbale, psychologique, écrite, économique ou sexuelle. La violence s’attaque à l’intégrité ou au bien-être physique ou psychologique, aux droits ou aux biens d’une personne.

En bref, un adulte qui œuvre en milieu scolaire est susceptible d’être victime ou témoin de gestes de violence dans son quotidien, et ce, à différents niveaux et de la part de plusieurs acteurs. À ce sujet, les travaux de la Chaire démontrent que la prévalence des gestes de violence entre les différents acteurs de la communauté scolaire est interreliée. Cela veut dire que le climat interpersonnel joue un rôle important dans la prévalence de la violence à l’école. Ainsi, un climat scolaire tendu, parsemé de gestes de violence directs ou indirects entre les adultes a un impact sur le nombre de gestes violents commis entre les élèves d’un même milieu scolaire, ce qui contribue à augmenter le climat de violence de façon générale dans l’école.

Évidemment, ce climat de violence amène son lot de conséquences tant au niveau physique que psychologique chez ceux qui les subissent (fatigue, stress, insécurité, manque de sentiment de compétence, etc.).

Si un ou une élève victime de gestes de violence ou d’intimidation peut facilement en venir à vouloir s’absenter de son environnement scolaire et éprouver du ressentiment envers celui-ci, il en est de même pour les membres du personnel scolaire qui en sont aux prises.

Le mal-être psychologique vécu par un membre du personnel d’un établissement scolaire est un sujet complexe et multifactoriel. Le fait de prendre conscience que cela n’est pas sans impact sur les élèves, le climat de travail et les relations avec les parents est plus qu’important.

Que faire lorsque nous sommes un adulte qui gravite dans un tel climat? Comment renverser la vapeur et tendre vers un environnement plus doux et pacifique?

Il existe bel et bien un ingrédient miracle qui permet de basculer vers un environnement plus positif et vous le connaissez; il s’agit de la qualité humaine de la bienveillance! Depuis plusieurs années déjà, la bienveillance est une valeur reconnue et promue par les milieux scolaires. D’ailleurs, un changement de paradigme s’opère, puisqu’au lieu de parler de diminution des gestes de violence et d’intimidation, les établissements scolaires instaurent, dans leurs codes de vie, différentes règles pour favoriser les comportements positifs et bienveillants.

Mais au juste, c’est quoi la bienveillance?

Selon le Ministère de l’Éducation du Québec (2018), la bienveillance est un savoir-être qui va bien au-delà du respect et de la tolérance. Elle incite la personne à se préoccuper de l’autre, à en prendre soin. En contexte scolaire, cela se traduit par des gestes et des attitudes empathiques qui témoignent d’une considération pour l’autre et d’une ouverture à son égard. Il est question de bienveillance lorsqu’il y a :

  • Une volonté de viser le bien et le bonheur d’autrui.
  • Un regard aimant, compréhensif et sans jugement porté sur autrui, en souhaitant qu’il se sente bien et en y veillant (Gueguen, 2015).
  • Une attention face aux besoins de l’autre, vouloir son bien et le lui démontrer, avec rigueur et générosité (Beaumont, 2016).

La bienveillance, c’est une qualité humaine qui consiste à être consciemment gentil envers les autres. La bienveillance, c’est de prendre des nouvelles de nos collègues souvent. C’est de leur demander comment ça va, et faire son gros possible pour décoder un faux ça va bien, en proposant un soutien et une écoute. C’est d’inviter les nouveaux membres de l’équipe aux 5 à 7 et aux dîners de groupe et profiter de l’occasion pour s’intéresser à eux et à elles. C’est d’offrir une disponibilité, d’être présent, avec gentillesse et intérêt. C’est de partager des outils, des stratégies et des astuces qui fonctionnent bien pour nous au quotidien.

Mais d’abord et avant tout, pour être en mesure de pratiquer la gentillesse consciente envers les autres, il faut être capable de bienveillance envers soi-même. Dans le cas contraire, cela sera très difficile, voire impossible, de l’appliquer avec les autres. Parce que si l’on n’écoute pas nos propres besoins, comment est-ce possible d’écouter ceux des autres?

Selon Boris Amiot, pour laisser notre bienveillance se révéler, nous devons nous débarrasser des mauvais apprentissages du passé qui consistent à se comparer aux autres et à juger, évaluer et critiquer sans cesse autrui, en cachant nos faiblesses.

Au contraire, reconnaître et accepter ses faiblesses est une piste pour cultiver sa bienveillance intérieure. En voici d’autres:

  • S’arrêter pour prendre sa météo intérieure en se demandant comment l’on se sent et de quoi nous aurions besoin à cet instant.
  • Mettre ses limites et oser dire non, quitte à déplaire.
  • Exprimer ses besoins et affirmer sa personnalité.
  • Savourer l’instant présent et apprécier récolter la bienveillance auprès des autres lorsque nous en semons, c’est le retour du balancier!

Il est fort à parier que les élèves qui évoluent dans une culture de bienveillance seront plus enclins à éprouver plus d’indulgence et de gentillesse par rapport à eux et à redistribuer cette douceur consciemment et de façon positive dans leur entourage. Être capable de cultiver la bienveillance est une qualité humaine précieuse qui fera des jeunes d’aujourd’hui des adultes de demain beaucoup plus heureux et épanouis.

Et vous, comment cultivez-vous votre bienveillance?

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